Platform for African – European Partnership in Agricultural Research for Development

Friday, April 17, 2020

Assurer la sécurité alimentaire à l’ère du COVID-19 : ce que doivent privilégier les gouvernements



Ben Moses Ilakut : De nombreux pays ont interrompu d’importantes activités socio-économiques en raison du nouveau coronavirus (COVID-19) qui se propage rapidement à travers le monde et met en péril les moyens d’existence.

On craint de plus en plus que le pire soit à venir en ce qui concerne la sécurité alimentaire et nutritionnelle. Les mois d’avril et de mai pourraient connaître les pires perturbations dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire depuis la crise alimentaire mondiale de 2007-2008 qui avait pour origine une flambée des prix des denrées alimentaires. Cette crise alimentaire avait atteint son point culminant en 2011 ce qui avait poussé l’ASARECA à mener des activités de sensibilisation basées sur des données probantes en collaboration avec le CGIAR en vue de juguler la hausse des prix des denrées alimentaires. L’approche consistait à tenir les décideurs bien informés des tendances alimentaires et de leurs incidences en vue d’éviter des mesures politiques de circonstance qui auraient pu aggraver la situation.

Options stratégiques
À l’époque, il avait été recommandé aux dirigeants de travailler ensemble en tant que région pour permettre l’acheminement des vivres des zones de production et des régions ayant un surplus vers les régions souffrant de déficit alimentaire et d’utiliser la crise pour stimuler la production locale, l’intégration régionale et le commerce régional. Il est difficile d’y parvenir face à la pandémie de coronavirus étant donné qu’il faut trouver un équilibre entre arrêter la propagation de la maladie grâce la limitation des contacts et assurer les mouvements en situation d’urgence pour fournir la nourriture aux familles. Il est toutefois possible de réussir ce tour de force.
Un bon exemple à cet égard est l’approche adoptée par l’Ouganda. Lors de ses séances d’information régulières sur les mesures prises en vue de contenir la propagation de la maladie, le Président ougandais Yoweri Museveni a littéralement arrêté toutes les activités qui pourraient compromettre la distanciation sociale. Il s’est toutefois toujours gardé d’étendre les mesures de restriction à la circulation transfrontalière et à l’intérieur du pays des marchandises, notamment la circulation des produits alimentaires. L’interdiction de voyager ne s’applique pas au fret à l’arrivée et au départ ni aux livraisons internes. C’est une décision que pourraient prendre les gouvernements du monde entier car selon la FAO « il y a suffisamment de nourriture dans le monde pour nourrir tout le monde.

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Là où le bât blesse
Le CGIAR, le
plus important groupement international de l’AR4D a mis en évidence les principaux domaines où les choses pourraient mal tourner si elles ne sont pas adéquatement appréhendées. Il s’agit notamment des systèmes alimentaires qui ont été particulièrement touchés (cet impact augmentera davantage si les entreprises de transformation ne sont pas en mesure de relancer la production dans un proche avenir) ; de la production de cultures vivrières si la pandémie se poursuit jusque pendant la période critique de semis ; de la désorganisation des échanges commerciaux nationaux et internationaux qui pourrait déclencher la flambée des prix des denrées alimentaires ; des mesures de restriction en matière de déplacements qui pourraient notamment provoquer des pénuries de main d’œuvre.

 Affectation de ressources aux greniers à blé (dans les zones rurales)
 Il est heureux que les zones rurales africaines ne soient pas aussi vulnérables à la propagation du COVID-19 que les villes. De nombreux pays ont déjà pris des mesures en vue d’empêcher les populations urbaines de propager le virus dans les zones rurales qui sont naturellement les greniers à blé. Toutefois, les mesures de restriction de circulation pourraient avoir une incidence sur la productivité agricole du fait de la pénurie d’engrais, de services vétérinaires et d’autres intrants. La fermeture des établissements de restauration pourrait également entrainer une réduction de la production de produits frais et de produits de la pêche et affecter les producteurs et les fournisseurs. Les États devraient par conséquent veiller à ce que les zones rurales disposent d’intrants agricoles et de services de vulgarisation pour les encourager à produire davantage pour nourrir les populations urbaines. Étant donné le régime pluviométrique actuellement favorable, cela pourrait être une bonne occasion pour les agriculteurs de tirer profit du fait que les citadins sont confinés chez eux et ont besoin de plus de vivres.
 Logistique pour l’acheminement des vivres
Il y a également lieu de mettre en place des systèmes logistiques y compris l’entreposage, le transport et les équipements de protection pour acheminer les vivres depuis le lieu de production et des régions ayant un surplus vers les régions souffrant de déficit alimentaire. Partant du constant que la pandémie de coronavirus pourrait empirer avant de s’améliorer, les États pourraient protéger les populations du virus, investir dans des installations pour stocker des vivres et les acheminer là où l’on a le plus besoin. 
Domaines d’intervention d’urgence
 Selon le CIGIAR,  les initiatives actuelles doivent privilégier un appui croissant aux entités de production, la facilitation du commerce et la pleine utilisation des marchés internationaux pour garantir l’offre et la demande alimentaire ; la garantie du bon déroulement des opérations logistiques des chaînes régionales d’approvisionnement agricole et de distribution alimentaire ;  la surveillance du prix des denrées alimentaires et le renforcement de la surveillance des marchés ; la clarification des enjeux liés aux marchés « humides » et  l’interface entre animaux sauvages et animaux d’élevage et  les façons de diminuer l’incidence de zoonoses à l’avenir et d’appuyer l’initiative One Health (« une seule santé ») ; le renforcement de la résilience et l’atténuation des perturbations sociales en augmentant la production de denrées agricoles et l’accès à l’eau. Il ressort clairement de cette liste qu’une action régionale coordonnée axée sur la production et le maintien de la distribution de denrées alimentaires joue un rôle important dans l’atténuation des effets du COVID-19. 

On peut soutenir que si les décideurs s’abstiennent d’interrompre les exportations et les importations de produits alimentaires, le coronavirus n’aura que peu d’incidence sur la sécurité alimentaire et nutritionnelle.



Source: fao.org , asareca.org


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